Dégagés de leur gangue – passé, quotidien ou indifférence –, voici réunis des gestes aux éclats durs, à la trouble beauté. Ces gemmes, Sylvie Kandé les expose dans Gestuaire, son troisième recueil poétique. “De même que Michel Leiris, dans Glossaire, serrait ses gloses, dans Gestuaire, je serre mes gestes. Des gestes de mort et de vie, d’extrême tendresse et de violence inouïe, qui fissurent la surface lisse de l’évidence et bouleversent le temps dans sa course annoncée.” SK

Gestuaire was short-listed for the Prix Kowalski des Lycéens, le Prix Ethiophiles and received the Prix Louise Labé in 2017.

 

D’un coup tombait une fraîcheur
sur cette maison qui n’était pas de plain-pied
Mais on avait beau dire et faire
apprêtant déjà pagnes lourds et encensoirs
seule la lumière tremblait à se transir un peu
et les formes domptaient encore
la meute des ombres à leurs pieds

Ah l’aurais-je assez aimé
ce soubassement fait de rêves et de parpaings
où les lares alanguis aimaient à deviser !
On m’écrit qu’on l’a démoli depuis !
Qu’aux crues ses épaufrures n’ont pas cédé !
Que juré ! cette hausse
on en avait longtemps causé
Dieu ne l’avait pas voulu
le temps avait manqué !
Je ne réponds de rien
sinon du crépuscule qui s’ajournait
quand venait l’heure de vanner